Ramallah, le 26 décembre 2025, WAFA – Les données de surveillance et de documentation recueillies par le Comité des libertés du Syndicat des journalistes palestiniens, couvrant la période du 7 octobre 2023 à fin 2025, ont révélé une escalade systématique et croissante des attaques meurtrières contre les journalistes palestiniens.
Cette escalade a atteint son paroxysme en 2025, marquant un net passage de violations sporadiques à une politique systématique de museler la presse par le biais d'assassinats, de blessures et d'invalidités permanentes.
Les données ont montré que le nombre de journalistes blessés à la fin novembre 2025 s'élevait à 76, un indicateur alarmant de l'escalade de cette politique de ciblage. Les journalistes ne sont plus de simples « cibles potentielles », mais des cibles avérées et répétées.
Dans un rapport du Comité des libertés, le Syndicat a affirmé qu'en 2025, l'occupation israélienne est passée d'une politique de restriction du travail journalistique à une politique de « neutralisation » de la presse par la force létale. L'objectif est de réduire les témoins au silence, d'empêcher la documentation des crimes et d'étouffer le récit palestinien sur le terrain.
Le comité a indiqué que 2025 marquera l'apogée des attaques sanglantes contre les journalistes en Palestine et pourra être décrite comme une année de ciblage massif et répété, notamment dans les tentes, les hôpitaux et les rassemblements de presse. Cette année sera également marquée par des frappes meurtrières et invalidantes visant la tête, le cou, la poitrine et l'abdomen, entraînant des amputations, la cécité et des handicaps permanents. Le danger se conjugue à plusieurs sources : l'armée d'occupation et les colons, les drones et les tirs d'artillerie.
L'analyse chronologique des données a révélé que de janvier à mars 2025, les bombardements de domiciles de journalistes dans la bande de Gaza se sont poursuivis, parallèlement à des signalements de blessures par balles réelles en Cisjordanie, notamment à Jénine, Hébron et Ramallah.
Cette période a également été marquée par une nette escalade des attaques contre les centres de presse et les journalistes dans les quartiers résidentiels. Ces attaques ne se fondaient plus uniquement sur le moment de la couverture médiatique, mais aussi sur l'identité du journaliste.
En avril et mai 2025, les attaques ont pris une tournure plus sombre, avec des assassinats ciblés de journalistes. Les événements des 7 et 8 avril, lors desquels la tente des journalistes de l'hôpital Nasser a été prise pour cible, ont constitué un tournant.
Neuf journalistes ont été blessés simultanément, du matériel journalistique a été détruit et plusieurs journalistes ont succombé à leurs blessures. Cet incident, documenté et récurrent, s'est produit dans un lieu connu et a impliqué l'utilisation d'armes lourdes, constituant ainsi un crime de guerre complexe et un ciblage collectif de la presse.
En juin 2025, des massacres de journalistes ont été recensés alors qu'ils couvraient des événements dans des écoles, des hôpitaux et sur des places publiques.
En juillet et août 2025, un ensemble de handicaps permanents est apparu : la perte de la vue du journaliste Akram Dalloul, l'amputation d'une jambe pour le journaliste Jamal Badah et la paralysie permanente du journaliste Muhammad Fayeq, ainsi que des traumatismes crâniens et cervicaux répétés. Ces éléments indiquent un schéma de blessures entraînant des handicaps permanents plutôt que des accidents.
Entre septembre et novembre 2025, le cycle de violence s'est intensifié avec la poursuite des bombardements sur la bande de Gaza et l'escalade des attaques de colons en Cisjordanie, notamment à Beita et Hébron.
Ces attaques comprenaient des passages à tabac, des attaques à la voiture bélier, des incendies criminels de véhicules et la destruction de matériel journalistique. Des journalistes ont également été blessés alors qu'ils couvraient la récolte des olives, un événement purement civil, ce qui témoigne d'une alliance de fait entre les violences militaires et celles des colons.
Géographiquement, les données ont montré que la bande de Gaza était l'endroit le plus dangereux au monde pour les journalistes, en particulier à Gaza-Ville, Khan Younis, Deir el-Balah, Nuseirat, Jabalia et Rafah, où les attaques se concentraient dans les tentes de journalistes, les hôpitaux, les écoles accueillant des personnes déplacées et les habitations privées.
En Cisjordanie, les attaques se concentraient à Jérusalem, Jénine, Naplouse, Beita, Tulkarem, Hébron et Ramallah.
Le syndicat a déclaré que les attaques visaient principalement les Palestiniens, notamment par des passages à tabac, des tirs à balles réelles, des gaz lacrymogènes et des grenades assourdissantes, ainsi que par des attaques de colons sous la protection de l'armée d'occupation.
Ces attaques étaient perpétrées par divers moyens, tels que des drones de reconnaissance et chargés d'explosifs, des bombardements aériens intensifs, des tirs d'artillerie, des balles réelles et à balles en caoutchouc, des coups de matraque et de crosse de fusil, et des véhicules militaires fonçant sur les Palestiniens.
Les blessures étaient principalement localisées à la tête (hémorragies, perte de vision, fractures), ainsi qu'au cou, à la poitrine, à l'abdomen, au bassin et à la colonne vertébrale, entraînant des cas de paralysie. Des amputations et des handicaps ont également été constatés. Le syndicat a qualifié ces attaques de délibérées et mortelles.
Le comité a confirmé que la grande majorité de ces blessures sont survenues lors de reportages sur le terrain, dans des lieux fréquentés par les journalistes, malgré le port de gilets et de badges de presse. Le comité a également relevé des cas répétés de journalistes pris pour cible.
Le Comité pour les libertés a conclu son rapport en soulignant que le ciblage des journalistes en Palestine constitue une atteinte directe à la vérité et à la liberté d'opinion et d'expression, et que l'impunité dont jouissent les auteurs de ces actes encourage d'autres crimes contre les professionnels des médias.
Le président du Comité pour les libertés du Syndicat des journalistes, Muhammad al-Lahham, a déclaré que les événements de 2025 constituent des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité, et représentent un ciblage systématique d'un groupe protégé – les journalistes – dans le cadre d'une politique officielle visant à museler les médias par la force.
Al-Lahham a ajouté qu'il ne s'agissait pas d'incidents isolés, mais plutôt d'une « doctrine de terrain fondée sur le principe “pas de témoins, pas de récit, pas d'image” ».
Al-Lahham a également déclaré que le ciblage des journalistes en Palestine n'était plus accidentel ni circonstanciel, mais était devenu une composante structurelle des pratiques militaires et sécuritaires de l'occupation.
F.N


